Vous avez peut-être déjà été surpris par le nombre de questions que vous pose votre conseiller financier avant de vous proposer un investissement. Pourquoi tant de formalités ? L’Autorité des marchés financiers (AMF) apporte des éclaircissements à travers un guide destiné à mieux comprendre cette démarche et son rôle dans la protection des épargnants.
Une obligation légale pour mieux protéger les clients
Avant de vous recommander un produit financier, votre intermédiaire (banquier, conseiller en gestion de patrimoine, courtier en ligne…) doit recueillir des informations précises sur votre situation financière, vos objectifs et votre niveau de connaissance des marchés. Bien que ces questions puissent sembler intrusives, elles répondent en réalité à une exigence légale visant à garantir des conseils adaptés et à limiter les risques pour les investisseurs.
Dans une publication de fin février, l’AMF rappelle le cadre réglementaire en vigueur et détaille les informations essentielles que les professionnels du secteur doivent collecter avant toute recommandation d’investissement.
Un questionnaire pour adapter les conseils financiers
Le guide rappelle que tous les intermédiaires financiers doivent s’assurer que les produits proposés sont bien en adéquation avec votre situation financière, vos objectifs, votre horizon de placement, ainsi que votre tolérance au risque et votre niveau de connaissance des marchés.
Cette évaluation est obligatoire dès lors qu’un conseil vous est délivré sur un investissement, qu’il s’agisse d’actions, d’obligations, de fonds ou de SICAV.
Prenons l’exemple d’une assurance-vie multisupport, qui combine fonds en euros (garantis) et unités de compte (potentiellement plus rentables mais comportant un risque de perte en capital). Avant de vous la recommander, votre conseiller doit se renseigner sur votre situation professionnelle (métier, date prévue de départ à la retraite, etc.) ainsi que sur votre situation personnelle (âge, résidence fiscale, nombre de personnes à charge, etc.).
Pour déterminer votre profil, il va aussi chercher à comprendre le but de votre investissement, sa durée, son risque, son potentiel de rendement, etc.
Ces informations permettent d’affiner votre profil d’investisseur et d’orienter les recommandations vers des placements en adéquation avec votre situation et vos objectifs. Les questions posées peuvent parfois être très précises, comme
Quels produits détenez-vous ?
Quels gains ou pertes avez-vous déjà enregistrés ?
Quelle a été votre réaction face aux fluctuations des marchés ?
Il n’existe pas de « bonne » ou de « mauvaise » réponse, et vous n’êtes pas tenu de suivre les conseils donnés. Cependant, si vous souhaitez investir dans un produit que votre conseiller juge inadapté à votre profil, il a l’obligation de vous en avertir.
Son devoir d’alerte vise à vous sensibiliser aux risques encourus, et il peut exiger une signature attestant que vous avez pris connaissance de ses recommandations. L’AMF insiste d’ailleurs sur l’importance de répondre avec sincérité et précision : plus vos réponses sont justes, plus les conseils prodigués seront pertinents et adaptés à votre situation.
Les cas où le devoir d’information ne s’applique pas
Si vous investissez de votre propre initiative dans une action, une obligation, un fonds ou une SICAV, votre intermédiaire financier n’est pas tenu de vous poser des questions. Vous prenez seul votre décision et n’avez pas à justifier vos choix d’investissement.
En revanche, cette règle ne s’applique pas aux produits considérés comme « complexes » ou à haut risque. Par exemple, les produits structurés, qui intègrent un effet de levier, nécessitent une vigilance particulière. S’ils peuvent amplifier les gains potentiels, ils sont aussi à même d’entraîner des pertes importantes en fonction de l’évolution des actifs sous-jacents.
Une prise en compte des préférences en matière de durabilité
Depuis août 2022, les intermédiaires financiers doivent également intégrer les préférences en matière dedurabilité des investisseurs. L’objectif est de déterminer :
Si vous souhaitez que vos investissements prennent en compte des critères environnementaux, sociaux ou de gouvernance (ESG) ;
Quelle part de votre portefeuille vous souhaitez consacrer à ces critères.
À ce titre, la loi Pacte impose depuis le 1er janvier 2022 aux assureurs de proposer au moins un fonds ISR (Investissement Socialement Responsable), un fonds « vert » et un fonds « solidaire » dans tous les contrats d’assurance-vie multisupports.
En conclusion, voici ce qu’il faut retenir :
L’information n’est pas obligatoire si vous investissez vous-même dans une action, une obligation, un fonds ou une SICAV.
L’information est obligatoire pour les produits complexes et à fort effet de levier.
L’information est obligatoire dans le cadre d’une gestion déléguée ou profilée sur des contrats de type assurance-vie.
Vous êtes libre de ne pas suivre les conseils de l’intermédiaire financier, mais une signature sera alors exigée afin que la responsabilité du conseiller ne puisse être engagée au motif qu’il aurait manqué à son obligation de conseil.
A contrario, l’AMF rappelle que la responsabilité du conseiller « peut être invoquée s’il vous a fait souscrire des produits manifestement trop risqués » alors que vos réponses à ses questions vous définissaient comme adepte des placements sans risque.
La loi de finances pour 2025, qui sera prochainement promulguée, exonère de droits de mutation à titre gratuit certaines donations familiales allouées à l’achat d’un logement. Voici dans quelles conditions.
Même si, grâce à la baisse des taux de crédit, les banques exigent un peu moins d’apport personnel qu’il y a un an, celui-ci doit représenter au moins 10% de votre achat immobilier pour vous permettre de décrocher un prêt. Ce qui impose par exemple de disposer de pas moins de 20 000 euros d’apport personnel pour financer l’achat d’un appartement vendu 200 000 euros. Pas évident, pour un primo-accédant, de disposer de telles économies. Bonne nouvelle, la loi de finances pour 2025, qui devrait être promulguée dans les prochains jours, exonère temporairement d’impôt (de droits de mutation à titre gratuit, précisément) les sommes d’argent données par les parents, grands-parents et arrière-grands-parents à leurs enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants pour l’achat d’un logement en vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) ou neuf, c’est-à-dire construit depuis cinq ans au plus.
Si vous n’avez ni enfants ni petits-enfants, cette exonération vaut pour les dons à vos neveux et nièces. Elle s’applique dans la limite de 100 000 euros alloués par un même donateur à un même donataire (la personne qui reçoit), et de 300 000 euros reçus par donataire. Ce dernier doit par ailleurs affecter cette somme à l’achat d’un logement neuf au plus tard six mois après l’avoir reçue.
Une mesure cumulable avec les abattements classiques en ligne directe
L’exonération vaut également si la somme d’argent reçue est affectée à la réalisation de travaux de rénovation énergétique, financés par l’aide publique MaPrimeRénov’, dans le logement dont le donataire est propriétaire et qu’il utilise à titre de résidence principale pendant cinq ans au moins après leur achèvement. De la même façon, le donataire qui achète un logement neuf ou en Vefa doit l’utiliser comme résidence principale pendant au moins cinq ans à partir de la date d’acquisition, ou le louer à titre de résidence principale pendant cinq ans minimum, pour être exonéré d’impôt sur le don reçu. A noter que le donataire ne peut pas louer le logement à un membre de son foyer fiscal, par exemple à l’un de ses enfants, sinon il perd le bénéfice de l’exonération d’impôt.
Celle-ci s’appliquera aux sommes d’argent données dès lendemain de la promulgation de la loi de finances pour 2025 et jusqu’au 31 décembre 2026. Est-elle cumulable avec la mesure qui permet à chaque parent de donner 100 000 euros à un enfant sans que celui-ci ait à payer des droits de mutation à titre gratuit ? «A mon sens, oui», répond Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris. «A priori, oui», renchérit Karen Berdugo, avocate fiscaliste à Paris.«Les deux mesures sont cumulables», confirme Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers, qui demandait cette exonération aux pouvoirs publics depuis le début de la crise du secteur, il y a plus de deux ans. Une exonération similaire avait vu le jour sous le gouvernement Balladur, lors de la crise immobilière du début des années 1990.
Se séparer d’un bien immobilier lors d’un divorce peut rapidement devenir un casse-tête. Faut-il vendre rapidement ? Louer le bien en attendant la fin de la procédure ? Une autre solution peut être l’indivision. Explications.
La France manque de logements. Début 2024, une étude détaillait même qu’il faudrait construire 400 000 logements chaque année jusqu’en 2030. Mais pour quelles raisons ? Il y a le vieillissement de la population, mais également les divorces qui jouent un rôle primordial. Justement, lorsqu’un couple divorce, que faut-il faire du bien acheté en commun ? Une des solutions est de vendre sa maison ou son appartement. Cependant, faut-il le faire avant ou après la procédure ? Les conséquences administratives et financières peuvent être importantes.
D’autant que selon le régime sous lequel vous vous êtes mariés, chacun ne récupérera pas la part qu’il espérait. Un des époux peut aussi racheter la part de l’autre, mais pourquoi ne pas opter pour l’indivision ? Comme l’indique TF1, cela peut être une solution plus ou moins pérenne car chacun conserve une quote-part. Cette procédure permet également de remettre une potentielle vente à plus tard et ne pas retarder le divorce, indiquent nos confrères. Surtout si le marché de l’immobilier est morose dans la région où vous résidez et que vous hésitez.
Une procédure à réaliser devant le notaire
L’indivision peut également être choisie dans le cas où un des deux époux cherche à racheter la part de l’autre, mais n’a pas encore tous les fonds. Si chacun parvient à se reloger entre-temps, cela peut être également le moyen de réaliser un investissement locatif afin de se partager à parts égales les loyers par exemple. Dans tous les cas, les deux époux doivent consentir à placer leur bien en indivision. Notez que si l’un des propriétaires souhaite mettre fin à l’indivision, l’autre devra soit accepter la vente du bien, soit racheter les parts de son conjoint.
En outre, il ne s’agit pas d’une procédure orale. L’acte doit être établi devant notaire, rappelle TF1, ce qui engendrera forcément quelques frais. L’acte doit enfin établir les conditions d’application comme, par exemple, si un des deux époux jouit du bien. Dernier élément à prendre en compte : chaque propriétaire est tenu de participer aux dettes liées au bien à hauteur de la part détenue.
L’indivision permet donc d’éviter de payer le droit de partage (droit d’enregistrement qui s’applique sur les partages de biens, de meubles et d’immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés), applicable au moment de la dissolution du patrimoine d’un couple. Réfléchissez donc bien avant de prendre votre décision !
Lorsqu’un héritier a un doute sur la consistance du patrimoine de la succession, il peut accepter « à concurrence de l’actif net ». Les créanciers doivent rapidement se déclarer, y compris, déclare la Cour de cassation*, s’il s’agit de l’un des héritiers ayant une créance à valoir !
Dans ce dossier soumis à la Cour de cassation, un homme est décédé en 2015, en laissant pour lui succéder son épouse, leur fils mineur ainsi que deux filles issues d’une précédente union. Les quatre héritiers ont accepté la succession à concurrence de l’actif net (autrefois, « sous bénéfice d’inventaire »), une option possible si l’on craint que les dettes du défunt excèdent le montant de son patrimoine.
La procédure, rappelons-le, est lourde, puisque les héritiers doivent effectuer une déclaration de leur acceptation soit auprès d’un notaire soit auprès du greffe du tribunal judiciaire (dont dépend le domicile du défunt). Ils doivent faire paraître un avis dans un journal local d’annonces légales et au bulletin légal, le BODACC, cela pour informer les créanciers. De même pour l’inventaire.
Près de 320 000 € de créance
Dans cette affaire, en 2017, la veuve a assigné ses deux belles-filles en règlement de 159 800 € pour chacune correspondant à leur quote-part de la dette d’impôt sur le revenu des années 2014 et 2015 du défunt mari, une dette qu’elle avait assumée seule en sa qualité de codébitrice solidaire.
Cette demande est légitime. Pourtant, cette veuve va échouer en première instance, en appel et en cassation. En effet, selon l’article 792 du code civil, les créanciers qui ont un montant à faire valoir sur la succession doivent le notifier dans les 15 mois au « domicile élu de la succession » (souvent l’étude notariale). Lorsque la créance ne peut pas être chiffrée, elle doit être déclarée « à titre provisionnel sur la base d’une évaluation ». Faute de déclaration dans ce délai (à compter de la publicité de la déclaration d’acceptation de succession, au BODACC), les créances non assorties de sûretés sur la succession sont éteintes.
Ce délai, affirmait la veuve, n’est pas applicable aux créances en contribution détenues par un héritier à l’encontre de ses cohéritiers pour leurs parts respectives.
Tous les créanciers sans exception
L’article 792 cible les créanciers, sans exception ; alors la Cour de cassation confirme la cour d’appel, cette obligation de déclaration s’impose aussi à l’héritier codébiteur solidaire du défunt.
En l’occurrence, 1°) l’origine de la dette d’impôt sur le revenu est antérieure à la date du décès ; donc, c’est une dette de la succession incombant aux quatre héritiers. 2°) La veuve a réglé par la suite la totalité de la dette d’impôts à l’administration fiscale en tant que codébitrice solidaire, ce qui la rendait « créancière de la succession et non directement créancière des autres héritiers, ces derniers venant seulement aux droits et obligations de leur auteur du chef duquel était née la dette fiscale ».
>>>Nos commentaires : Dura lex sed lex ! Il est curieux d’assimiler l’un des héritiers ayant une créance sur les autres à un créancier sur la succession. Mais l’article 792 ne l’exclut pas ! Sans doute le notaire en charge de la succession a-t-il considéré que cette veuve n’avait pas à se soumettre à cette obligation de déclaration et de publicité ! Celle-ci pourrait être tentée de se retourner contre lui compte tenu de l’importance de sa créance…
Rappelons que la déclaration de créances ne doit pas être faite avant la publicité au BODACC (Cass. civ. 1ère 31 mars 2016 n° 15-10.799), sinon elle est sans valeur. Et elle doit être faite à l’adresse du « domicile élu » mentionnée dans la déclaration d’acceptation de la succession (en l’espèce celle du notaire alors que le créancier a envoyé sa notification au domicile de l’héritier unique) (Cass. civ. 1ère 8 mars 2017, n° 16-14.360 ; 16 janvier 2019, n° 18-11.916).
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, des amendements adoptés en commission des finances visent à durcir les conditions du Pacte Dutreil, un dispositif fiscal jusqu’ici avantageux pour les transmissions d’entreprises.
Des amendements adoptés en commission des finances dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 visent à durcir les conditions du Pacte Dutreil, un dispositif fiscal jusqu’ici avantageux pour les transmissions d’entreprises. Ces modifications pourraient avoir des répercussions significatives sur les entrepreneurs et les familles concernées.
Le Pacte Dutreil est un mécanisme qui permet aux familles de transmettre une entreprise en bénéficiant d’un abattement de 75 % sur les droits de mutation. Ce dispositif a été conçu pour faciliter la pérennité des entreprises familiales en allégeant la charge fiscale lors des successions ou des donations. Cependant, il est régulièrement critiqué pour sa générosité supposée envers les ménages les plus aisés, et le gouvernement envisage aujourd’hui de le restreindre.
Des actifs éligibles plus limités
L’un des amendements propose de circonscrire l’exonération fiscale aux seuls actifs strictement professionnels de l’entreprise. En clair, les actifs financiers ou immobiliers qui ne sont pas directement liés à l’activité opérationnelle ne seraient plus éligibles à l’abattement de 75 %.
Cette mesure viserait à recentrer le dispositif sur sa finalité initiale : faciliter la transmission des entreprises familiales sans encourager des stratégies d’optimisation fiscale. En limitant l’exonération aux seuls actifs opérationnels, le législateur entend éviter que des éléments patrimoniaux non essentiels à l’activité bénéficient indûment de l’abattement.
Une tranche d’âge pour les donataires
Une autre modification notable concerne l’âge des bénéficiaires de la transmission. Le texte prévoit que pour bénéficier du Pacte Dutreil, au moins un des donataires doit être âgé de 18 à 60 ans au moment de la transmission. Cette condition supplémentaire vise à encourager la transmission aux générations actives, susceptibles de s’impliquer dans la gestion de l’entreprise, plutôt qu’à des héritiers plus éloignés ou moins engagés.
Un calcul de la plus-value révisé
Le dernier amendement adopté en commission touche au calcul de la plus-value en cas de revente de l’entreprise après une transmission sous le régime du Pacte Dutreil. Actuellement, lors de la cession, la plus-value est calculée en soustrayant la valeur d’acquisition (généralement la valeur de l’entreprise au moment de la donation ou de la succession) du prix de vente. L’abattement de 75 % n’est pas pris en compte dans ce calcul, ce qui réduit le montant de la plus-value imposable.
Avec la nouvelle proposition, la valeur d’acquisition serait réduite de l’abattement initial. Cette modification augmenterait donc significativement l’imposition sur la plus-value lors de la revente.
Des implications majeures pour les entreprises familiales
Ces amendements suscitent des préoccupations chez les entrepreneurs et les fiscalistes. La restriction des actifs éligibles pourrait compliquer la structuration patrimoniale des entreprises familiales, notamment celles qui détiennent des actifs immobiliers ou financiers pour des raisons stratégiques ou historiques. De plus, l’exigence d’un donataire âgé de 18 à 60 ans pourrait exclure certaines transmissions familiales, notamment lorsque les héritiers sont plus jeunes ou plus âgés.
Le recalcul de la plus-value imposable pourrait également dissuader les bénéficiaires de céder l’entreprise, même si cela s’avère nécessaire pour des raisons économiques ou personnelles. Cela pourrait entraver la fluidité du marché des entreprises et limiter les opportunités de croissance ou de restructuration.
Un équilibre délicat entre justice fiscale et pérennité économique
Le gouvernement justifie ces mesures par la volonté de réduire les niches fiscales et de garantir une plus grande équité fiscale. Cependant, les opposants à ces amendements soulignent que le Pacte Dutreil est essentiel pour maintenir les entreprises familiales en activité et préserver l’emploi. Ils craignent que ce durcissement ne fragilise un tissu économique déjà éprouvé.
Le débat est donc lancé entre la nécessité de réformer un dispositif jugé trop avantageux pour certains et l’importance de soutenir les entreprises familiales, qui constituent une part significative de l’économie française.
Pour le commun des mortels, la flat tax reste à 30%. Mais pour les plus riches, elle va monter à 37,2%, pour les revenus des placements encaissés en 2024. Avec la traditionnelle petite rétroactivité, donc…
Mettre les plus riches à contribution. Le gouvernement Barnier s’en serait bien passé, mais l’état des finances publiques ne le lui permet pas. Les plus riches, ceux qui acquittent déjà la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), de 3% ou de 4% (ceux dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 250 000 euros pour un célibataire et 500 000 euros pour un couple), vont être davantage mis à contribution.
Le projet de loi de finances pour 2025 instaure en effet une imposition minimale de ces plus hauts revenus (les mêmes que ceux qui acquittent la CEHR) de 20%. «Ainsi dès lors que le taux moyen d’imposition au titre de l’impôt sur le revenu et de la CEHR sera inférieur à 20% du revenu fiscal de référence, une contribution différentielle sera appliquée pour atteindre ce niveau d’imposition», selon le projet de loi de finances pour 2025.
Ce que cela signifie en creux, c’est que la flat tax payable par ces personnes fortunées va elle aussi augmenter. Mesure phare de la politique fiscale d’Emmanuel Macron, elle avait été instaurée au tout début de son premier quinquennat, en 2018, pour taxer tous les revenus de l’épargne et du capital, à un taux unique de 30% (12,8% d’impôt sur le revenu + 17,2% de prélèvements sociaux).
Avant, ces revenus étaient soumis au barème de l’impôt sur le revenu, et cela pouvait monter très très haut, notamment pour les contribuables qui étaient dans la tranche d’imposition la plus élevée, celle à 45%. Leurs revenus d’épargne étaient taxés dans leur tranche, ce à quoi il fallait ajouter les prélèvements sociaux de 17,2%, pour une note finale supérieure à 60%.
Une mauvaise surprise dès l’imposition des revenus de 2024
Aujourd’hui, les revenus des placements sont donc taxés à 30%, c’est la fameuse flat tax instituée par le président de la République. Mais, c’est jusqu’à 33% pour ceux qui acquittent la CEHR à 3% et jusqu’à 34% pour ceux qui sont à 4% de CEHR. Avec la nouvelle règle issue du projet de loi de finances, cette contribution va monter à 37,2%, soit l’imposition minimale de 20% + les prélèvements sociaux de 17,2%. «C’est 4,2% ou 3,2% de plus qu’avant pour les produits des placements ou dividendes des plus fortunés», dit Sophie Nouy, directrice de l’ingénierie patrimoniale chez Cyrus Conseil.
Les revenus soumis à la flat tax sont les dividendes, les plus-values de valeurs mobilières (actions, obligations, etc.), les gains de l’assurance vie ou des PEL et CEL. «Les détenteurs de produits financiers sont donc concernés, mais ce sont surtout ceux qui vendent leur entreprise et qui réalisent une grosse plus-value de cession sur leurs actions qui sont en premier lieu touchés, explique Sophie Nouy. Et ceux qui ont vendu depuis le début de l’année vont avoir la mauvaise surprise de constater qu’ils sont taxés à 37,2% sur leur plus-value de cession, plutôt qu’à 33% ou 34%, comme ils pouvaient encore le croire hier !»
C’est la beauté de la fiscalité des revenus, où l’on connaît son taux d’imposition en… fin d’année, au moment du vote du budget ! Car en effet, «cette contribution s’appliquera à compter de l’imposition des revenus de l’année 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus de 2026», selon le projet de loi de finances. Pour l’heure, exceptionnelle donc, le temps d’accompagner la trajectoire de redressement des finances publiques !
Par Mireille WeinbergRédactrice en cheffe adjointe (Argent-Placements / Macro-économie)Publié le 10/10/2024 à 20h00, modifié le 11/10/2024 à 8h55
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