PUBLIÉ LE :04|03|2025 par Alexandre PANIZZO

Vous avez peut-être déjà été surpris par le nombre de questions que vous pose votre conseiller financier avant de vous proposer un investissement. Pourquoi tant de formalités ? L’Autorité des marchés financiers (AMF) apporte des éclaircissements à travers un guide destiné à mieux comprendre cette démarche et son rôle dans la protection des épargnants.

Une obligation légale pour mieux protéger les clients

Avant de vous recommander un produit financier, votre intermédiaire (banquier, conseiller en gestion de patrimoine, courtier en ligne…) doit recueillir des informations précises sur votre situation financière, vos objectifs et votre niveau de connaissance des marchés. Bien que ces questions puissent sembler intrusives, elles répondent en réalité à une exigence légale visant à garantir des conseils adaptés et à limiter les risques pour les investisseurs.

Dans une publication de fin février, l’AMF rappelle le cadre réglementaire en vigueur et détaille les informations essentielles que les professionnels du secteur doivent collecter avant toute recommandation d’investissement.

Un questionnaire pour adapter les conseils financiers

Le guide rappelle que tous les intermédiaires financiers doivent s’assurer que les produits proposés sont bien en adéquation avec votre situation financière, vos objectifs, votre horizon de placement, ainsi que votre tolérance au risque et votre niveau de connaissance des marchés.

Cette évaluation est obligatoire dès lors qu’un conseil vous est délivré sur un investissement, qu’il s’agisse d’actions, d’obligations, de fonds ou de SICAV.

Prenons l’exemple d’une assurance-vie multisupport, qui combine fonds en euros (garantis) et unités de compte (potentiellement plus rentables mais comportant un risque de perte en capital). Avant de vous la recommander, votre conseiller doit se renseigner sur votre situation professionnelle (métier, date prévue de départ à la retraite, etc.) ainsi que sur votre situation personnelle (âge, résidence fiscale, nombre de personnes à charge, etc.).

Pour déterminer votre profil, il va aussi chercher à comprendre le but de votre investissement, sa durée, son risque, son potentiel de rendement, etc.

Ces informations permettent d’affiner votre profil d’investisseur et d’orienter les recommandations vers des placements en adéquation avec votre situation et vos objectifs. Les questions posées peuvent parfois être très précises, comme


  • Quels produits détenez-vous ?
  • Quels gains ou pertes avez-vous déjà enregistrés ?
  • Quelle a été votre réaction face aux fluctuations des marchés ?

Il n’existe pas de « bonne » ou de « mauvaise » réponse, et vous n’êtes pas tenu de suivre les conseils donnés. Cependant, si vous souhaitez investir dans un produit que votre conseiller juge inadapté à votre profil, il a l’obligation de vous en avertir.

Son devoir d’alerte vise à vous sensibiliser aux risques encourus, et il peut exiger une signature attestant que vous avez pris connaissance de ses recommandations. L’AMF insiste d’ailleurs sur l’importance de répondre avec sincérité et précision : plus vos réponses sont justes, plus les conseils prodigués seront pertinents et adaptés à votre situation.

Les cas où le devoir d’information ne s’applique pas

Si vous investissez de votre propre initiative dans une action, une obligation, un fonds ou une SICAV, votre intermédiaire financier n’est pas tenu de vous poser des questions. Vous prenez seul votre décision et n’avez pas à justifier vos choix d’investissement.

En revanche, cette règle ne s’applique pas aux produits considérés comme « complexes » ou à haut risque. Par exemple, les produits structurés, qui intègrent un effet de levier, nécessitent une vigilance particulière. S’ils peuvent amplifier les gains potentiels, ils sont aussi à même d’entraîner des pertes importantes en fonction de l’évolution des actifs sous-jacents.

Une prise en compte des préférences en matière de durabilité

Depuis août 2022, les intermédiaires financiers doivent également intégrer les préférences en matière de durabilité des investisseurs. L’objectif est de déterminer :

  • Si vous souhaitez que vos investissements prennent en compte des critères environnementaux, sociaux ou de gouvernance (ESG) ;
  • Quelle part de votre portefeuille vous souhaitez consacrer à ces critères.

À ce titre, la loi Pacte impose depuis le 1er janvier 2022 aux assureurs de proposer au moins un fonds ISR (Investissement Socialement Responsable), un fonds « vert » et un fonds « solidaire » dans tous les contrats d’assurance-vie multisupports.

En conclusion, voici ce qu’il faut retenir :

  • L’information n’est pas obligatoire si vous investissez vous-même dans une action, une obligation, un fonds ou une SICAV.
  • L’information est obligatoire pour les produits complexes et à fort effet de levier.
  • L’information est obligatoire dans le cadre d’une gestion déléguée ou profilée sur des contrats de type assurance-vie.
  • Vous êtes libre de ne pas suivre les conseils de l’intermédiaire financier, mais une signature sera alors exigée afin que la responsabilité du conseiller ne puisse être engagée au motif qu’il aurait manqué à son obligation de conseil.

A contrario, l’AMF rappelle que la responsabilité du conseiller « peut être invoquée s’il vous a fait souscrire des produits manifestement trop risqués » alors que vos réponses à ses questions vous définissaient comme adepte des placements sans risque.